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L'accent circonflexe
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L'accent circonflexe  

Déçu que votre petite ile n'ait plus son petit nuage qui lui flotte dans le ciel ? Attristé parce que la cime n'a plus rien à donner à l'abime ? Au regret de ne plus prendre son casse-croute, au diner, sans casquette sur la tête ? Il faut bien l'admettre, cet accent ni grave ni aigu, mais un peu des deux, le circonflexe n'a plus la place qu'on lui attribuait jadis... mais il n'a pas disparu. Aujourd'hui, il n'a plus de raison d'exister sur un  i  ou sur un  u  que s'il permet d'éviter une confusion ou dans des cas précis de conjugaison de certains verbes[1].

Ce n'est que dans sa troisième édition (1740) que le dictionnaire de l'Académie a décidé de l'employer (avec un ê, sans doute pour rappeler l'amuïssement du 'ct' latin) pour « le remplacement de l'S qui marquoit l'allongement de la ſyllabe, nous l'avons remplacée par un accent circonflêxe (sic!) »

Depuis 1990, vous pouvez enfin écrire croute et voute comme route, buche comme huche, ile comme pile, il se plit comme il se tait, traine comme gaine ou haine, indument comme absolument, gout comme ragout, sans devoir vous soumettre aux arbitraires plus mondains que grammaticaux. Certains défenseurs de l'ancienne présence de l'accent circonflexe dans le mois d'aout (anciennement août) déplore qu'on ignorera bientôt que ce petit chapeau ne servait pas à protéger du soleil de ce mois, mais à se rappeler du S du mot latin AUGUSTUS, surnom donné à Octave, le petit-neveu et fils adoptif de JULES César (qui a donné son nom au mois de juillet de 31 jours) qui s'est fait appelé Auguste et qui a exigé que le mois d'auguste ait aussi 31 jours, malgré l'alternance de mois de 31 puis 30 jours qui existait à l'époque (six fois 31+30 font 366)... tout cela pour expliquer l'accent disparu en 1990.

Simplification partielle, car il faudra toujours expliquer pourquoi icône mais iconoclaste, grâce mais gracieux, château mais bateau, aumône mais clone, pédiatre mais grisâtre, mêler mais mélange, même mais thème, monôme mais atome, prêt mais secret, trêve mais grève, chaîne mais haine... ; et le problème n'est pas encore résolu pour jeûne, mais déjeuner. Bref, ce circonflexe a toujours été une belle occasion de s'arracher les cheveux...

 

* Historique
* Utilité de l'accent circonflexe (fonctions étymologique, graphique et phonétique)
* Jeûner et dérivés
* Nouvelle orthographe (1990) ?
* Anciennes régles non exhaustives  

  
 

Historique

Les Romains ne connaissaient pas les accents mais ont donné le nom à ce signe : circum-flectus = fléchi autour. Les Grecs distinguaient les sons brefs et les sons longs dans chaque mot et faisaient usage des accents et esprits pour les marquer. L'accent circonflexe grec ne pouvait se placer que sur des voyelles ou des diphtongues sur l'une des deux dernières syllabes d'un mot et ressemblait plus à un tilde (~) qu'à notre circonflexe actuel (^).

πνεμα (pneuma = air, souffle : cf. pneumologie, pneumatique) : indique que le α est plus court que le  ;
μετὰ τοτο (méta touto = après ceci : cf. métastase) ;
οτος ἐστιν ὁ χριστός (oútos estin o christós = c'est le Christ ou qui est l'oint ?) :
     si la voyelle a déjà un esprit, le circonflexe se place au-dessus ;
δολοί τίνες (doúloí tínes = tuiles [cf. “tiles” en anglais]) ;
οκος (oikos = maison : cf. économie = ordre dans la maison) ;
λόγων τινν (logon tinon = des mots : cf. logorrhée [diarrhée de mots], logopède, logique).

circonflexe_sylviusEn français, son apparition date de Jacques Dubois (né en 1478 et aussi connu sous le nom de Jacobus Sylvius, car il écrivait souvent en latin). Comme chez les Grecs, le circonflexe n'apparaissait que sur des diphtongues. Voir ci-contre.

Au début du XVIe siècle, on le voit apparaitre entre deux lettres pour marquer la disparition d'un précédent  e : vrai^ment, il pai^ra.

essais montaigne 1588Dans l'œuvre Essais de Montaigne (exemplaire de Bordeaux), dont un extrait ci-contre, on en découvre trois sous forme de tilde : pensé (pẽſé), Lyon (Lyõ) et “en se testonnant” (en ſe teſtõnant) [testonner = peigner les cheveux, les friser, les accommoder avec soin].
On y observe également les s longs (ſ : maiſon) sans en fin de mot, les nombreux digrammes (ſt : eſtre eſtouffé) dont certains donneront naissance à un circonflexe, la confusion entre les u et les v, les digrammes eu qui engendreront nos û dont certains perdront leur circonflexe (cheute : chute)...

Dans sa première édition du dictionnaire de l'Académie française (DAF), en 1694, nos Académiciens ont préféré l'ignorer, car elle « ſ'eſt attachée à l'ancienne Orthographe receuë parmi tous les gens de lettres, parce qu'elle ayde à faire connoiſtre l'Origine des mots. C'est pourquoy elle a creu ne devoir pas authoriſer le retranchement que des Particuliers, & principalement les Imprimeurs ont fait de quelques lettres, à la place deſquelles ils ont introduit certaines figures qu'ils ont inventées, parce que ce retranchement oſte tous les veſtiges de l'Analogie & des rapports qui ſont entre les mots qui viennent du Latin ou de quelque autres Langue ».
L'usage de ce signe ne s'imposa que très lentement et dans la deuxième édition (1718) les Académiciens se risquèrent à l'employer sur un seul mot, le participe «crû», noté «creu» dans l'édition précédente.
Ce n'est que dans sa troisième édition (1740) que l'Académie a commencé à accepter l'usage de l'accent circonflexe. Il marquait tantôt l'amuïssement d'une lettre (honneste > honnête), tantôt un allongement phonique (aage > âge) ou tantôt une distinction graphique (du/dû, mur/mûr, hotte/hôte). Ces trois rôles essentiels étaient souvent cumulés pour un même mot. Dans sa préface, elle annoce même le remplacement de l'S qui marquoit l'allongement de la ſyllabe, nous l'avons remplacée par un accent circonflêxe (sic!).
Dans la quatrième version (1762), elle regrette l'excès de l'usage des circonflexes introduit dans son édition précédente.

Au XIXe siècle déjà, Léon Bourgeois devenu ministre responsable de l'éducation publique française, était préoccupé du temps consacré à l'apprentissage de l'orthographe en français et de l'abus des exigences grammaticales consacrées à la dictée. En 1880, dans son discours au congrès pédagogique, Jules Ferry disait déjà : « Aussi, Messieurs, ce que nous vous demandons à tous, c'est de nous faire des hommes avant de nous faire des grammairiens ! »
Léon Bourgeois adresse aux enseignants une circulaire dont le titre en dit long sur ses intentions Circulaire ayant pour objet d'interdire l'abus des exigences grammaticales dans les dictées. On peut y lire : « une orthographe, à moins de pédantisme, nul ne peut prétendre à l'infaillibilité » et encore « Ne sachons pas trop mauvais gré à l'élève qui écrira contreindre comme étreindre et restreindre, cantonier comme timonier et comme cantonal... Y a-t-il un maître qui ait pu donner une bonne raison pour justifier la différence entre apercevoir et apparaître, entre alourdir et allonger, entre agrégation et agglomération ? »
Le ministre du XIXe siècle n'hésitait pas à mettre en cause l'intangibilité de cette orthographe trop rigide et trop gourmande en temps d'apprentissage. « N'y a-t-il pas toute vraisemblance que d'ici à une génération ou deux, la plupart de ces bizarreries auront disparu pour faire place à des simplifications analogues à celles qu'ont opérées sous nos yeux, depuis moins d'un siècle, les éditions successives du dictionnaire de l'Académie ? L'orthographe ne saurait être soustraite plus longtemps, par un dogmatisme intransigeant, aux lois de l'évolution. » C'était au XIXe siècle, nous sommes au XXIe siècle...

 

  
 

Utilité de l'accent circonflexe

Selon les auteurs, l'accent circonflexe parfois (ou souvent) considéré comme inutile, peut avoir diverses utilités :
– l'amuïssement d'une lettre du mot (fonction étymologique) ;
– la discrimination entre des quasi homographes (fonction graphique) ;
– la modification de la prononciation d'une voyelle (fonction phonétique).

 

 

amuïssement d'une lettre (fonction étymologique) : fête et feſte

Le cas le plus fréquemment rencontré est la disparition d'un “s long” (“ſ”) le plus souvent devant un “t” :
âne et aſne [asinus], arrêt mais arrestation, bête et beſte (bestial mais bétail), château et chaſteau [castellum], châtré mais chaste, côte et coſte (intercostal mais coteau), croûte et crouſte (croustillant), être et eſtre (êtes mais étions, étiez, était), fenêtre et feneſtre (défenestrer), fête et feſte (festin, festivité, festoyer), forêt et foreſt (forestier), gîte et giſte, hôpital et hoſpital (hospitalier, hospitalité), goût et gouſt (gustatif), jeûner et jeuſner, maître et maiſtre (bourgmestre), ôter et oſter, paître et paiſtre (pasteur), Pâques et Paſques (pascal), quête et queſte (question), tête et teſt (testonner mais tétard), prêt et preſt (prestation).
Remarquons que les anglophones ont souvent gardé ce  s  non amuï chez eux (beast, castle, coast, crost, feast, forest, disgusting, mister) et que les francophones ont souvent utilisé un autre accent pour marquer cette lettre disparue car devenue muette.
Les bons francophones et francophiles se seront demandé pourquoi ce circonflexe n'a pas été généralisé : peste, funeste, chaste, resiste, espoir, etc.

D'autres lettres disparues peuvent aussi expliquer l'apparition de l'accent circonflexe :
le français n'a pas retenu les cas où deux voyelles se succédaient (sans former une diphtongue) et signifiaient un allongement du son, il a préféré l'emploi de l'accent circonflexe là où le néerlandais l'a conservé pour ses sons longs (de baas, de haen, Oostende). Ainsi, aage est devenu âge, baailler est devenu bâiller et saoul soûl, roole rôle, anima est passé par anme avant de devenir âme, buxita est devenu boîte [box en anglais], le verbe déponent latin piscari (piscari, piscor, piscari, piscatum) est devenu pêcher alors que peccare est devenu pécher, connoiſtre est devenu connaître, géhenne « torture », terme dont se sert la Bible pour désigner l’enfer est devenu gêne, que l'on doit distinguer du gène, forgé sur le grec genos (naissance, comme Eugène, le bien né).
Le verbe être (anciennement écrit eſtre) n'a pris l'accent circonflexe qu'à l'infinitif et à la 2e personne du pluriel de l'indicatif présent (être et vous êtes) et, comme tous les verbes, mais avec un autre radical, dans les terminaisons verbales du passé simple (1re et 2e personnes du pluriel), du subjonctif imparfait (3e personne du singulier). Curieusement, être n'a gardé son “s” devant le “t” qu'à l'indicatif présent 3e personne du singulier (il est)... partout ailleurs, l'amuïssement de ce s long s'est transformé en accent aigu (été, étions, étais, étant...).

À l'origine, les lettres u et v n'étaient pas distinctes et l'ancienne diphtongue eu est devenue û : mouvoir (mouuoir ou meuuoir) avait meuu comme participe passé, et est devenu  ; devoir (deuuoir) > deu >  ; decima (dixième) > dixme > dîme ;

La question à se poser : est-il encore indispensable de compliquer l'orthographe d'une langue qu'on aimerait voir parlée universellement et devoir connaître l'étymologie de chaque mot et se rappeler que le mot “throne”, ainsi écrit dans les première et deuxième éditions du dictionnaire de l'Académie (l'Académie prend soin de rappeler, en 1740, une dernière fois que Quelques-uns écrivent Thrône juste pour contenter les résistants aux changements), et encore écrit ainsi en anglais, en perdant son “h” en français, a gagné un accent circonflexe ? La langue serait-elle en péril si nos jeunes ignoraient que il plaît prenait le circonflexe parce qu'il y a plusieurs siècles, on disait il ploiſt ? Ou faut-il admettre que nos amis anglophones ont mieux préservé l'étymologie des mots d'origine latine de leur langue ?

Faut-il que tout un chacun qui souhaite apprendre le français, soit capable de connaitre le latin et le grec ainsi que l'étymologie de chaque mot de notre langue ? N'oublions pas que cette fonction étymologique est souvent appelée fonction archéologique par les spécialistes de l'histoire de la langue. Si au moins cette étymologie archéologique nous permettait de mieux saisir l'utilité ou l'origine des accents circonflexes, mais l'étymologie ne peut déjà pas expliquer pourquoi un axiome (du grec ἀξίωμα) ne prend pas de circonflexe, alors que diplôme en prend un (du grec δίπλωμα), pourquoi pédiatre et psychiatre n'y ont pas droit, alors que bellâtre et albâtre l'exigent, pourquoi l'hirondelle de la grâce est-elle tombée en disgrace dans tant de dictionnaires (fait disgracieux dans tous les dictionnaires) ?

L'argument étymologique pour justifier la conservation du circonflexe français est plus souvent un leurre qu'une réalité. Un petit chapeau qui ne se justifie souvent que par la distinction sociale qu'il permet en recalant nos jeunes à l'épreuve du bac (Nina Catach nous rappelle que « 46 % des “fautes” d’orthographe au baccalauréat sont dues à l’accent »). Maurice Tournier signale qu'«aucun “s” originel devenu muet ne justifie le moindre de ces chapeaux» dans plusieurs mots de notre langue dont âcre, aîtres, alcôve, âme, arôme, août, bâcler, bâfrer, bâillon, bêler, câble, câpre, chaîne, châle, châsse, diplôme, disgrâce, dôme, drôle, empêcher, extrême, fêler, flâner, frêle, gêne, geôle, grâce, infâme, maltôte, mânes, môle, pâle, pâtir, (une) poêle, pôle, prêche, prône, râble, râle, rêne, Rhône, rôder, rôle, salpêtre, symptôme, suprême, trône ou vêler.

Certes, cette liste de Tournier n'est pas fiable à 100 % puisque tout le monde devrait savoir que notre actuel mois d'aout vient du nom de l'empereur Auguste (voir plus haut), mais qui parmi les défenseurs acharnés de ce petit chapeau peut expliquer son origine étymologique dans le mot chômage ?
À défaut d'une origine étymologique, cet accent sert essentiellement à se faire plaisir, à se montrer un chouia supérieur aux autres en se prétendant gardien de la vieille orthographe que l'on confond d'ailleurs avec la maitrise de la langue française. Cette petite hirondelle sur le dos chatouille plus l'esprit des savants de la langue qu'elle n'aide le locuteur moyen qui apprend notre langue et n'a cure de l'histoire ancienne des mots qu'il essaie de mémoriser. Évidemment, les résistants au changement insisteront pour que survive cet accent, particulièrement là où il n'a aucune utilité, juste pour compliquer encore davantage les dictées de nos enfants ou petits-enfants.

 

 

discrimination entre des quasi homographes (fonction graphique) : rôder et roder

Outre cette justification étymologique, l'absence du circonflexe pourrait entrainer une confusion entre deux mots en les rendant homographes (par exemple : boîte (récipient)/il boite (claudication) ; châsse (coffret)/chasse (gibier) ; vous dîtes (passé simple)/vous dites (indicatif présent) ; qu’il fût (sujonctif)/il fut (indicatif) ; forêt (grand bois)/foret (outil) ; hâler (bronzer)/haler (tirer) ; rôder (errer)/roder (mettre progressivement au point) ; tâche (besogne)/tache (marque).
On notera cependant que cette fonction est souvent remplie par un accent autre que le circonflexe : la (article ou pronom)/ (adverbe de lieu), ou (conjonction)/ (pronom relatif et seul mot de la langue française faisant usage de la lettre u avec accent grave), ça (pronom)/çà (adverbe de lieu).

Le lecteur averti aura noté que le plus souvent, la langue française ne fait aucun effort pour distinguer les homographes (ou quasi homographes).  Un accent sur voilà pourrait servir à le distinguer de voila, passé simple 3e personne du verbe voiler. De même, placer l'accent sur cela permettrait de le distinguer du passé simple de celer. Même Littré s'est trompé quand il a écrit que dus (pluriel de ) n'avait pas besoin d'être distingué, puisque il y a dus, 1re et 2e personnes du singulier du passé simple de devoir. La série n'est évidemment pas finie, il y aurait une foule d'homographes à distinguer. Voilà qui pourrait donner une nouvelle vitalité à l'accent circonflexe que l'on supprime aujourd'hui.
On aurait pu distinguer sentir (au sens olfactif) de sentîr (au sens tactile), et aussi abime (forme conjuguée de abimer, qui serait dépouillé de son ancien accent) et abîme (caverne) ; port (port de mer) et pôrt (fait de porter, ou col dans les Pyrénées) pouce (anatomie) et poûce (unité de mesure); pied (anatomie) et pîed (unité de mesure), etc.

trité_prononciation«Il y a eu le feu dans les fleurs.» Le lecteur attentif remarquera que le graphème français “eu” donne naissance à plusieurs phonèmes distincts, dont, notés en API [œ] et [ø].
Le premier [œ] est utilisé pour les mots: beurre, bonheur, chaleur, danseur, fleur, heure, largeur, leur, odeur, ordinateur,
le deuxième [ø] pour: aveu, bienheureux, chaleureux, eux, feu, heureux, jeu, joyeux, pneu, queue,
deux phonèmes (ce que l'on entend) pour un même graphème (ce que l'on écrit) et aucun signe distinctif, aucune règle pour les distinguer (heure et heureux, chaleur et chaleureux, bonheur et bienheureux...), pas même un accent.

Prétendre conserver l'accent circonflexe pour éviter la confusion si on rendait certains mots homographes, alors que le français ne distingue même pas des phonèmes différents pour des graphèmes identiques, cela n'apporte pas une once de sérieux à l'argumentation apportée. Certains spécialistes tentent d'expliquer que le phonème est utilisé lorsqu'il est suivi d'un “r” : quel malheur, c'est oublier les malheureux qui se fient à cette règle qui n'est qu'un leurre.
D'autres experts de la langue présenteront aussi le troisième phonème de notre digramme français “eu”, à savoir le [y] ou /u/ qui est propre selon eux au verbe “avoir” (il a eu, tu eus voulu, il t fallu, que nous eussions...) et qui se justifie par l'ancienne prononciation en deux syllabes [əy], réduite à [y] au XIVe siècle. Beaucoup d'autres mots sont dans le même cas (veuseurdeumeurpleu, …) ont vu leur graphie modifiée peu à peu au XVIe siècle (vusûrmûrplu…). Ce n'est qu'en 1740, dans sa troisième édition que l'Académie française l’emploi du « circonflêxe » pour marquer certains issus de l’ancien hiatus eu et les voyelles suivies d’un qui, dit-elle, « marquoit l’allongement de la syllabe » : ce qui donne âgé, ajoûte, bientôt, être, fût (passé simple), honnête, ôté, plaît, plustôt, reçû, soûmettant, soûtenu, tâcher, toûjours, vûe. Dès 1762, l'Académie regrette l'excès de l'usage des circonflexes introduit dans son édition précédente et en supprime certains... malheureusement pas tous... pourquoi ?

Se limiter au digramme “eu” qui se prononce [y], c'est ne pas tenir compte des rectifications acceptées par l'Académie en 1990 concernant la prononciation et l'écriture des mots comme argüer et gageüre. Argüer doit se prononcer (ar-gu-é) mais ne s'est jamais écrit avec un tréma avant 1990. En 1792, dans sa quatrième édition du dictionnaire, l'Académie précisait déjà
« ARGUER. v.a. (l'U se prononce). Reprendre, contredire. Il est vieux en ce sens, & n'a plus guère d'usage qu'au Palais »
et en 1872, Émile Littré, dans son dictionnaire ajoutait le commentaire
« ARGUER.1 (ar-gu-é. L'Académie ne conjugue pas ce verbe ; mais il faut écrire avec tréma : j'arguë, tu arguës, il arguë ; et même il serait bien d'écrire argüer, argüant, argüé, pour indiquer la prononciation ; autrement on le confondrait avec le verbe arguer 2) v. a. 1. Contredire, accuser. Arguer une pièce de faux. 2. Tirer une conséquence. Qu'arguez-vous de cela ? Absolument. VOLT., Goût.: Je suis ce juge intègre Qui toujours parle, arguë et contredit »
mais ajoutait une deuxième définition
« ARGUER.2 (ar-ghé ; il argue se prononce il argh') v. a. Technologie. Passer un fil de métal par les trous de l'argue »
Merci pour ces rectifications de 1990, car sans tréma, argüer devrait se prononcer comme larguer (les amarres) et pas comme ruer... encore une occasion de larguer nos amis qui souhaitent apprendre notre belle langue (à ne pas prononcer lan-gu-e).

Tout le monde aura compris que la nouvelle consigne pour le tréma est de prononcer la lettre sur laquelle le signe se place et qui sans ce tréma, pourrait former un digramme avec la lettre qui la précède, et pas comme jadis avant 1990, sur la voyelle qui suit celle qui doit être prononcée séparément; maïs dit doit se prononcer ma-is, et non mai-s (anciennement, le tréma sur le 'i' signalait qu'il fallait prononcer le 'a' (ce qui était exact) ; depuis 1990, le tréma sur le 'i' signale qu'il faut prononcer le 'i' pour éviter qu'il ne fasse digramme avec le 'a' qui le précède et soit compris comme un “ai” que l'on devrait prononcé 'é' ou 'è' selon le parler local du français (ce qui nous parait aussi exact, mais nettement plus précis)), (c'était encore une complication pour éviter de rendre trop facile l'apprentissage du français). ???

Gageüre ne rime pas avec voyageur ni partageur, mais avec injure ou parjure... et n'a jamais connu de tréma avant 1990... le défi (gageure ou gageüre) à relever? l'appartenance du “e” à deux digrammes différents:
“ge” où le 'e' a souvent comme utilité le prononciation du 'g' dans notre langue et langage quotidien. Le principe général est : la lettre g note un son dur devant les voyelles a, o, u et devant une consonne (langage, polygone, aigu, aigle, aigre); elle note un son doux devant les voyelles e, i et y (langage, gigle, gyratoire). Mais on peut durcir ou adoucie ce son : pour adoucir g devant a o et u (voyageant, mangeoire), on intercale la voyelle e entre les deux; pour durcir g devant e et i, on intercale la voyelle u entre les deux (figue, guitare, Guy).
Le problème du mot gageure (écrit à l'ancienne mode ici) est que le 'e' peut être interprêté comme partie du digramme “eu” avec le u qui suit et doit alors se prononcer “jeur” comme partageur ou autre nageur, mais il peut aussi être considéré comme digramme “ge” qui devant la voyelle 'u' servirait à adoucir le g dur qui a sa place devant le "u" qui suit, et
“eu”, digramme et graphème dont question ci-dessus.

Comble de malheur, l'ancienne règle (le tréma se place sur la voyelle qui suit celle qui doit être prononcée séparément), avec le tréma sur le 'u', amenait le lecteur à prononcer le 'e', voyelle qui précédait le u sur lequel était le tréma et dire «ga-ge-u-re», qui n'est pas la prononciation souhaitée.
La nouvelle règle du tréma (prononcer la lettre sur laquelle le signe se place et qui sans ce tréma, formerait un digramme avec la lettre qui la précède), avec le tréma sur le 'u', amène le lecteur à prononcer le 'u', sans tenir compte du digramme “eu” formé en l'absence de tréma, rien de plus que ce que l'on souhaitait depuis des siècles.
Il n'a fallu que quatre siècles pour que nos spécialistes de la langue arrivent à re-formuler cette règle, il est possible que quatre siècles suffiront aux éternels résistants aux changements (volontairement au pluriel, ici) avant qu'ils n'acceptent la logique de cette nouvelle règle, évolution positive (et donc pas de régression) de notre langue.

 

 

 

modification de la prononciation d'une voyelle (fonction phonétique) : côte et cote

La présence de l'accent circonflexe sert parfois à distinguer par la prononciation un mot d'un autre, la variante avec accent circonflexe aura un son plus long que celle sans ce circonflexe. Cet allongement du son ne trouve pas toujours une explication étymologique, il trouvait son origine dans le distinction « sociale » des gens qui l'utilisaient : les Parisiens de la haute bourgeoisie se vantaient d'aller au théâtre en insistant sur le son “a” vontairement allongé. Cette distinction ne doit pas nécessairement provenir d'une différence étymologique : hôte et hotte, côte et cote, tâche et tache, jeûne et jeune, faîte et faite, abîme.

Si c'est ici que l'accent circonflexe trouverait son utilité principale, quoique... On est en droit de se demander
pourquoi arôme et trône prennent l'accent, mais aromatique et introniser ne le prennent pas,
pourquoi cône et côte en veulent et conique et coteau le refusent,
pourquoi moutarde et moût, venant du même mot latin mustum (artdens) n'ont-ils pas réagi de façon identique,
pourquoi diplôme et binôme l'exigent et diplomatique et binomial le rejettent,
pourquoi tout dépôt et extrême le prônent et tout dépotoir et extrémité le dédaignent,
pourquoi une grâce est choyée de l'avoir en sa présence mais un gracieux ou un gracié ne peut jouir de cette grâce,
pourquoi est-ce une infamie de l'oublier sur infâme,
pourquoi hésiter, ce serait sûrement et assurément manquer de confiance,
pourquoi manque-t-on d'assurance si on n'accentue pas sûr,
pourquoi se mêlerait-on les pinceaux en n'accentuant pas ce mélange,
pourquoi perdrait-on ses coordonnées polaires si on l'oubliait sur pôle,
pourquoi risquerait-on de ratisser avec un râteau sans son chapeau sur la tête...

Cette fonction est souvent remplie par l'usage d'autres accents en français : pensons à prés et près, la et là, dés et dès, etc. Un circonflexe de temps en temps, en lieu et place d'un autre accent, permet bien sûr d'enlever des points à une dictée, mais a-t-il toujours l'utilité qu'on lui attribue ?

  
 

Jeûner et dérivés

Allez savoir pourquoi jusqu'en 1990, on écrivait jeûner et le jeûne, mais à jeun et déjeuner...
Étymologiquement, jeûner vient du latin jejunare = ne pas manger, qui a donné jeuſner, d'où l'accent circonflexe. Pourquoi l'accent a-t-il disparu sur à jeun et ses composés ?
Étymologiquement encore, le déjeuner (préfixe ou dis qui exprimer la cessation d'un état ou d'une action, ou encore l'état ou l'action inverses [unir-désunir, lier-délier, faire-défaire, intérêt-désintérêt] et jeûner pour se priver de nourriture) est bien le premier repas de la journée après le jeûne de la nuit... mais les Français de France ont donné ce nom à un repas qui n'a plus cette catégorie mais a été gardé grosso modo en Belgique, au Québec et en Suisse. Le jeÛne, ne devrait-il pas, lui aussi, s’écrire déjeÛner ? Tous les deux avec ou tous les deux sans accent... Poser la question, c’est y répondre. Pourtant, l’accent brille par son absence lors de la rupture du jeûne. Pourquoi alors écrire déjeuner ? C'est donc ça la logique de la langue française...
Faut-il s'étonner de ce pays, considéré comme le nœud ou le centre de la francophonie, qui appelle déjeuner le repas de midi, alors qu'on rompt le jeûne le matin, alors que jusqu'en 1932 (8e édition du DA) tous les dictionnaires définissaient ce repas comme celui du matin (en 1932, nouvelle définition : « DÉJEUNER. n. m. Repas du matin ou celui du milieu du jour. Son déjeuner lui pèse sur l'estomac. Les magasins restent généralement fermés à l'heure du déjeuner. Déjeuner du matin. Déjeuner de midi. Le petit déjeuner,Celui qui se prend au lever. Il se dit aussi des Mets, des aliments qu'on mange à ce repas. Quel bon déjeuner on nous a servi ! »), mais appellent après-midi (avec un -s interdit au pluriel, avant 1990), après-dîner ou après-dînée (avec -s obligatoire au pluriel) le temps qui suivait le dîner, repas pris autrefois à midi.
Faut-il s'étonner que ce déjeuner se soit écrit sans accent, juste pour compliquer un peu l'apprentissage des jeunes... il est vrai qu'on avait peu à apprendre à l'époque.

Avant de poursuivre, rappelons-nous que les lettres  i  et  j  n'étaient pas différenciées, de même les  u  et  v , l'une considérée comme voyelle et l'autre comme consonne aujourd'hui.
D'après Robert Estienne (1552, Dictionarium latinogallicum, soit un siècle et demi avant le premier dictionnaire de l'Académie), le disjunare devient un deſjeuner sans s après le u. Avec l'élimination précoce de l'hiatus, une nouvelle prononciation (courte !) s'est installé pour deſjeuner : [dezhœne].
Cette prononciation brève pour œ est sans doute soutenu par la première syllabe [de-] sur laquelle repose un accent tonique, et de suite aussi un accent aigu dans l'orthographe (déjeuner).
D'après Jean Nicot (1606, Threſor de la langue françoyſe), il ne fallait pas marquer ce “u” : on y lira les mots le ieun, la ieune, la iune (origine de à jeun, sans accent circonflexe) et le verbe ieuner, iuner, et enfin deieiunare ce qui aurait (comme chez ieiunare) mené sans doute au même hiatus et à la même prononciation et orthographe moderne avec [ø] et un accent circonflexe.
D'après l'Académie française, dans ses première (1694), quatrième (1762) et cinquième (1792) éditions, on écrit toujours à jeun, mais pour le jeûne, on lit jeuſne et jeuſner, deſjeuſner (en 1694, 1re éd.), puis avec un accent circonflexe en 1740 (3e éd.) et 1762 (4e éd.), et à nouveau sans accent circonflexe en 1792 (5e éd.)... et, comme il est agréable de changer, en 1835 (6e éd.), l'Académie décide de supprimer définitivement l'accent, mais autorise la dernière syllabe () ou ()... il est vrai qu'on ne s'étonne plus des pas en avant puis en arrière des responsables de notre langue.

Situation enfin réglée par les dispositions de 1990, s'il y a risque de confusion, il garde l'accent circonflexe, sinon on le supprime : jeune (peu avancé en âge) pourrait se confondre avec jeûne (privation d'aliments), l'accent doit donc être conservé ; alors que déjeuner ne risque aucune confusion, donc plus d'accent (mais aux trois premères personnes de l'indicatif présent, il y aurait confusion possible : je jeûne, tu jeûnes, il jeûne).

 

  
 

Nouvelle orthographe (1990)

L'accent circonflexe disparait sur i et u.
On le maintient néanmoins dans les terminaisons verbales du passé simple (1re et 2e personnes du pluriel), du subjonctif imparfait (3e personne du singulier) et dans cinq cas d'ambigüité.

ancienne orthographe
nouvelle orthographe

coût
entraîner, nous entraînons
paraître, il paraît

cout
entrainer, nous entrainons
paraitre, il parait

Observation Les mots où le circonflexe est conservé parce qu'il apporte une distinction de sens utile sont : les adjectifs masculins singuliers mûr et sûr, jeûne(s) et les formes de croitre qui, sans accent, se confondraient avec celles de croire (je croîs, tu croîs, etc.).

• Sur i et u, l'accent circonflexe ne joue aucun rôle phonétique ; il est l'une des principales causes d'erreurs et son emploi, aléatoire, ne peut être justifié par l'étymologie.

La nouvelle orthographe précise l'accent conservé sur l'adjectif jeûne, mais à notre connaissance jeune avec l'accent circonflexe n'est pas un adjectif... mais peut-être que la virgule avant jeûne n'a-t-elle pas le même poids que celle entre dû et mû... d'où l'intérêt de bien maitriser la typographie. Cela signifierait-il que jeuner ne doit pas le garder (aucune confusion possible)... mais je jeûne, tu jeûnes et il jeûne au singulier devraient le garder ?

 

 

 

  
 

Anciennes règles ou astuces non exhaustives

Avant 1990, différents grammairiens, souvent obligés de déplorer qu'il n'existe pas de règles générales sur l'utilisation de cet accent mal aimé, ont essayé de structurer l'emploi de notre hirondelle inversée. Quelques règles (que nous préférons appeler astuces), trouvées de ci de là, mais aucune qui nous permette de savoir quel mot utilise ou rejette ce petit signe ailé qui fait voyager l’imagination... malheureusement pas des potaches de nos écoles qui ne savaient jamais trop s'ils devaient le laisser s'envoler ou pas, sous peine de sanction...

Nous tenterons de reprendre et compléter ce relevé :

astuce 1

Le « i » des verbes en -aître et en -oître ainsi que du verbe « plaire » prennent l'accent circonflexe uniquement lorsque cet -i est suivi d’un -t  :

Ex. : Il reconnaîtra, nous paraîtront, vous croîtriez...

NDLR : Malheureusement, pas de liste des verbes en -aître ou -oître...
           et pas de liste d'autres mots...
Nous avons donc cherché les mots finissant par :
-aître : 15 verbes (apparaître, comparaître, connaître, disparaître, méconnaître, naître, paître, paraître, réapparaître,
                       recomparaître, reconnaître, renaître, repaître, reparaître, transparaître)
           et 3 noms (contremaître, maître, traître)
-oître : 4 verbes (croître, accroître, décroître, recroître)
           et 2 noms (cloître, goître)
Cette liste ne tient évidemment aucun compte des dérivés de ces mots : maîtresse, traîtreusement...

 

astuce 2

Les « o » des pronoms possessifs prennent l'accent circonflexe, pour ne pas les confondre avec les adjectifs possessifs.

Ex. : le/la nôtre, le/la vôtre, les nôtres, les vôtres

 

astuce 3

Le « a » des mots se terminant par  -iatre  ne prennent pas l'accent (sauf acariâtre et opiniâtre), mais ceux se terminant par -âtre mais pas -iâtre le prennent, s'ils indiquent une dépréciation de valeur.

Ex. 1 : acariâtre*, albâtre, beigeâtre, bellâtre, blanchâtre, bleuâtre, brunâtre, châtre, cocâtre, douceâtre, embatre (embattre 1990), emplâtre, écolâtre, fillâtre, filsâtre, finâtre, folâtre, gentillâtre, grisâtre, iconolâtre, idolâtre, idolâtré, jaunâtre, marâtre, mulâtre, noirâtre, olivâtre, opiniâtre*, opiniâtré*, palâtre, parâtre, rosâtre, rougeâtre, roussâtre, saumâtre, verdâtre, violâtre, zoolâtre.

Ex. 2 : archiatre (parfois archiâtre), gériatre, hippiatre (parfois : hippiâtre), neuropsychiatre, pédiatre, pédopsychiatre, phoniatre, psychiatre,

NDLR : pour les autres, à vous de savoir : amphithéâtre, âtre, pâtre (berger), plâtre (et tous les mots de cette famille), quatre (4), ranatre (insecte), théâtre (scène), vératre,

 

astuce 4

Dans toute conjugaison, l'accent circonflexe est nécessaire sur les 1re et 2e personnes du pluriel du passé simple et à la 3e personne du singulier du subjonctif imparfait.

Ex. : nous eûmes, vous fûtes, nous mangeâmes, vous fîtes
     quil eût, qu'elle fût, qu'il mangeât, qu'elle fît

Exception : le verbe haïr qui, au passé simple de l'indicatif et au subjonctif imparfait, ne prend pas le circonflexe attendu, car la voyelle qui devrait en être frappée a déjà le tréma : nous haïmesvous haïtesqu'il haït.

 

astuce 5

Le « i » de trois noms se terminant par  -ître prennent l'accent :

bélître (mendiant, sot, importun), épître (lettre missive), huître (mollusque marin)

 

astuce 6

Le « o » des mots se terminant par -ose ne prennent pas d'accent circonflexe (sauf nivôsepluviôse et ventôse, mois du calendrier républicain).

Ex. : dosevirtuosechoserose, glucosefructoselactose

 

astuce 7

Le « o » fermé des mots se terminant par -ole prend toujours l'accent circonflexe, ainsi que ses dérivés (sauf drolatique, dérivé de drôle).

Ex. : drôle, pôle, rôle, tôle, geôle, contrôle, tôlier, contrôlable

 

astuce 8

Certains mots qui ont perdu une lettre au fil du temps (le plus souvent un “s”) ont marqué cette perte par un accent circonflexe.

Ex. : voir « amuïssement d'un lettre » (ci-dessus)

NDLR : Tout le monde regrettera que cette règle explique la présence de certains accents circonflexes, mais n'est en aucun cas une règle que l'on puisse considérer comme permettant d'améliorer ses connaissances relatives à l'utilisation de l'accent circonflexe. Seuls l'usage de la langue, une longue pratique, d'énormes efforts de mémorisation permettraient à un apprenant d'améliorer graduellement sa maitrise de la langue française : voilà bien une règle qui n'en n'est pas une...

 

astuce 9

On retrouve aussi l'accent circonflexe sur certains adjectifs et noms.

Ex. (adjectifs) :

Ex. (noms) :

NDLR : Aucune allusion aux verbes ou adverbes qui sont aussi aléatoirement affublés de ce petit chapeau.

 

 

astuce 10

On forme les adverbes en -ment à partir d'adjectifs ou de participes passés.

+1- généralement, pour les adjectifs se terminant par une consonne, à partir de son féminin auquel on ajoute -ment :

Ex. : cher > chère > chèrement ; doux > douce > doucement ; joyeux > joyeuse > joyeusement ; léger > légère > légèrement ; petit > petite > petitement ; sec > sèche > sèchement.

Exceptions : bref – brève, mais brièvement ; concis – concise, mais concisément ; confus – confuse, mais confusément ; exprès – expresse, mais expressément ; exquis – exquise, mais exquisément ; gentil – gentille, mais gentiment ; importun – importune, mais importunément ; obscur – obscure, mais obscurément ; (im)précis – (im)précise, mais (im)précisément ; profond – profonde, mais profondément ; profus – profuse, mais profusément.

+2- pour les adjectifs se terminant par -ant, l'adverbe se termine par -amment

Ex.  : courant > couramment ; méchant > méchamment ; savant > savamment.  

+3- pour les adjectifs se terminant par -ent, l'adverbe se termine par -emment :

Ex. : intelligent > intelligemment ; prudent > prudemment ; fréquent > fréquemment.  

Exception : lent > lentement (r1);

+4- pour les adjectifs se terminant par une voyelle, on ajoute simplement -ment :

Ex.  : bête > bêtement ; simple > simplement .  
       joli > joliment ; infini > infiniment ;
       effronté > effrontément ; décidé > décidément.
       éperdu > éperdument ; ingénu > ingénument ; résolu > résolument.

Exceptions 1 : certains adjectifs en -e transforment ce -e final en é et se terminent en -ément :  
       commode > commodément ; conforme > conformément ; dense > densément ; énorme > énormément ; immense > immensément ; intense > intensément ; posthume > posthumément.

Exceptions 2 : certains adjectifs en -i 
       gai > gaiement ou gaîment ; impuni > impunément.

Exceptions 3 : certains adjectifs en -u prenaient, selon les dictionnaires, l'accent circonflexe -ûment jusqu'en 1990 :  
       ardu → ardûment ; assidu → assidûment ; congru → congrûment ; continu → continûment (continument) ; cru → crûment ; dru → drûment (drument) ; dû → dûment ; goulu → goulûment ; incongru → incongrûment ; indu → indûment (indument) ; nu → nûment ; prétendu → prétendûment (prétendument) ; ténu → ténûment.

Exceptions 4 : certains adjectifs en -e :  
       traître > traîtreusement  

 

 

Pas de raisons de craindre la cohabitation des écritures adaptées rapidement aux changements avec celles des éternels résistants aux changements : déjà au XVIe siècle les deux orthographes ont coexisté pendant près de deux cents ans avant que le circonflexe ne s'impose, car il rendait l'écriture plus simple.

N'oublions pas que :
– d'une part, le choix des éditeurs de livres scolaires a été de choisir en 2016 d'uniformiser la langue française en respectant les rectifications suggérées en 1990,
– d'autre part, que la majorité des francophones et apprenants de la langue française et les locuteurs "moyens" n'ont cure de cette étymologie archaïque. Elle complique sensiblement la graphie de cette langue que d'aucuns veulent apprendre, et les réformes orthographiques multiples ont (très souvent) visé la simplicité de l'écriture. Mais il semble que la conservation de notre hirondelle française soit là davantage pour les préoccupations de savants ou de vieux gardiens d'une langue ancestrale que celles des locuteurs actuels.

Les éternels gardiens ou autres réhabilitateurs de la langue française vous expliqueront probablement avec grande facilité pour quelle raison « sûrement » (écrit surement en 1762, dans le 4e édition du DAF) prend l'accent circonflexe alors que « assurément » n'en prend pas : l'un s'écrivant seurement et l'autre asseurement dans les dictionnaires de 1694 et 1718 de l'Académie française... époque où le mot « vue » s'écrivait veuë et où le « déjeuner, repas qu'on fait le matin avant le diſner » passait de déjeuſner à deſjeuner.

Cet accent qui nuit tant à la bonne connaissance de la langue, ne pourrait-on pas le supprimer là où il s'avère inutile, veiller à son remplacement possible par un accent (grave ou aigu), et seulement là où il existe sans rajout sur les claviers des machines (à, è, ù) et uniquement si cela s’avère nécessaire... Cela ne suffirait-il pas amplement à éviter les ambigüités sémantiques qui servent encore parfois à le justifier ? et à éviter près de la moitié des erreurs à nos dictées de langue française ?

 

  • D

 

[1] Nous l'avions repris de https://www.orthographe-recommandee.info/regles4.htm, mais une recherche en mars 2018 nous montre que 518 pages ont repris le texte «parce qu'il apporte une distinction de sens utile»

   

 





Voir aussi :

et les caractères spéciaux avec "alt"... toujours utile... touche alt

caractère
capitale
À Â Ç È É Ê Ë Î Ï Ô Ù Û Ü
alt + 4 chiffr. 0192 0194 0199 0200 0201 0202 0203 0206 0207 0212 0217 0219 0220
alt + 3 chiffr. 183 182 128 212 144 210 211 215 216 226 235 234 154
 
caractère
bas d casse
à â ç è é ê ë î ï ô ù û ü
alt + 4 chiffr. 0224 0226 0231 0232 0233 0234 0235 0238 0239 0244 0249 0251 0252
alt + 3 chiffr. 133 131 135 138 130 136 137 140 139 147 151 150 129
 
caract§re
autre
« » œ æ Œ Æ esp.
inséc.
"
alt + 4 chiffr. 0171 0187 0156 0230 0140 0198 0133 0160 0147 0148 0034 0145 0146
alt + 2 ou 3 chiffr. 174 175 339 145 338 146 / 255 / / 34 / /
 
caractère
autre
¡ ¿ ¼ ½ ¾ ± ñ Ñ . .
alt + 4 chiffr. 0150 0151 0161 0191 0188 0189 0190 0177 0241 0209 0128 0 0
alt + 2 ou 3 chiffr.     173 168 172 171 243 241 164 165 / / /

Si vous n'avez pas de pavé numérique sur un ordi portable,
il suffit d'appuyer sur les touches Fn et NumLock (Inser) en même temps,
et le pavé numérique sur les touches
clavier numérique7(7)   8(8)   9(9)   0(/)

U(4)   I(5)   O(6)   P(*)

  J(1) K(2)   L(3)   M(-)


  ?(0)           /(.)   §+(+)

(la dernière ligne/colonne est/sont différente(s) selon les claviers belges, français...)
 
 


 
sera activé
et les raccourcis Alt + code chiffré fonctionneront.

 

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